Pas du tout mon genre (ni le mien...)
Un titre original et accrocheur. Une photographie plus qu'expressive. Un résumé alléchant : "Je suis la seconde fille, la seconde épouse, le second violon. Je joue
en sourdine une partie plus basse que le premier. Je suis le second
couteau que l'on cache, pour les basses oeuvres, les pires besognes.
Habituées à l'ombre, ces amoureuses sont douées pour disparaître, se
faire oublier. Elles finissent seules en général. Sans avoir vu
s'évanouir les années. "
Isabelle Spaak nous offre ainsi son deuxième roman, Pas du tout mon genre. La jeune écrivain aborde un sujet douloureux, souvent complexe : ces femmes de l'ombre, ces maîtresses. Tout du moins, c'est ce que l'on croit avec ce titre, cette photographie et la quatrième de couverture. Rapidement pourtant, les lignes chavirent vers l'enfance de l'auteur, ses vacances à l'île de Ré, les tromperies (déjà) de son père. L'écriture est agréable, les mots sûrs et tranchants. Cependant, le tout laisse un goût amer.
Le lecteur comprend, trop tard, que cet ouvrage fait suite à Ca ne se fait pas, son premier roman. Roman au travers duquel elle raconte, de manière juste et émouvante, le décès de ses parents (sa mère tue son père et se donne la mort). Roman intimiste par lequel, en essayant de reconstruire l'histoire de ses parents, elle tente de reconstruire la sienne mais aussi toute celle de sa famille (son grand père, Paul-Henry Spaak est un des pères fondateurs de l'Europe). Les deux livres sont liés tout en étant lisibles séparément mais pour moi, l'un ne va pas sans l'autre. Dommage que le lecteur lambda ne le sache pas par une petite note en bas de la quatrième de couverture.
Isabelle Spaak plonge le lecteur dans sa vie dés
les premières pages. Sa vie de deuxième femme. Sa rencontre avec l'homme marié
est simplement évoquée. Un quai de gare. On n'en saura
guère plus. On ne saura à aucun moment le prénom
de la narratrice (est-ce d'ailleurs véritablement l'auteur?), ni celui de son amant. On devine que l'histoire se
passe en Belgique par quelques indices semés ici ou là. Mais tout le roman est une sorte de grand flou. D'inachevé.
Quelques incompréhensions demeurent : la place accordée à la photographie dans le roman par exemple. Ou encore les évocations à plusieurs reprises d'amours illégitimes célèbres (ceux de Gauguin, de Jean
Paulhan ou encore de Victor Hugo avec Juliette Drouet) qui finalement n'aboutissent àr rien. Mais aussi la présence, répétitive, de sa nourrice avec qui elle avait noué une relation quasi maternelle. C'est d'ailleurs le seul personnage à être nommé.
Le lecteur a du mal à faire le lien et se demande en permanence, "pourquoi" ? Isabelle
Spaak avait déclaré dans une interview qu'elle brodait
« autour de la place de la seconde »,
la seconde d'une fratrie et la seconde femme, illégitime,
d'un homme. L'idée était intéressante mais ce va
et vient entre les histoires, les époques et les voies narratives devient malheureusement assez vite lassant.
Isabelle Spaak avait aussi déclaré préférer la suggestion, l’évocation à l’affirmation. Mais à force de trop en user, Pas du tout mon genre* ne devient pas du tout le mien.
* Pas du tout mon genre a fait partie de la dernière sélection du prix Interallié 2006. Il a obtenu deux voix sur les dix requises.